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La piètre place de la philosophie au Bac au Bénin et ses conséquences: que faire ?

Par
Joseph AKOUTOU
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Enseignant de philosophie, Joseph AKOUTOU est également journaliste et écrivain
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Les examens du baccalauréat dans le monde ont été composés en ce mois de Juin. C’est le cas en France, au Bénin et dans la sous-région notamment au Burkina Faso. Une curiosité intellectuelle nous a poussés à une petite comparaison au niveau du poids que représente la philosophie dans le cursus des candidats dans ces différents pays du monde en général et au Bénin en particulier. Il ressort de notre constat que comparativement aux autres pays, dans son ensemble, le baccalauréat de l’ancien quartier latin de l’Afrique laisse une place à désirer à la discipline mère des sciences. 

Avant de nous attarder sur le sujet annoncé plus haut, permettez-nous une petite digression s’il en est. La voici : nos sociétés modernes vivent des malaises profonds dus à la crise environnementale et aux crises socio-politiques.  Le Bénin n’est pas en marge de ces phénomènes redoutables. En témoigne les changements climatiques ressentis depuis quelques années maintenant au pays de Kaba et de Behanzin, l’irrégularité des saisons, les tensions politiques, la guerre (le terrorisme au nord du pays). Ainsi, on assiste à une crise environnementale et sociale alarmantes sans précédent au Bénin. 

L’origine de la crise, la négligence de la philosophie.

L’homme dans sa recherche de l’intérêt détruit la nature, orchestre des guerres. L’état actuel de l’ampleur des dégâts dus aux activités scientifiques, techniques et économiques nous questionne sur notre relation avec la nature. Les guerres, les terrorismes dus aux progrès nous poussent en outre à nous questionner sur notre rapport avec autrui. La réponse la plus importante parmi tant d’autres à ces problèmes liés à la technoscience et à l’économie, c’est l’éducation. Or dans cette éducation, il y a des disciplines. Ce sont les disciplines enseignées qui déterminent le profil du citoyen responsable équilibré dans ses activités économiques et dans ses rapports avec la nature et avec autrui. 

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En effet, l’équilibre entre le matériel et l’humain dépend de l’équilibre entre les matières à visée de création des richesses matérielles et celles du développement du sens moral. Mais cet équilibre n’est pas observé dans l’enseignement au Bénin. Ce constat doit inquiéter l’homme avertit. Les matières enseignées dans nos lycées et collèges donnent toute la primauté aux matières qui poursuivent l’intérêt au détriment de la philosophie dont le but fondamental est d’humaniser.

Si la tendance des pays développés actuellement c’est l’introduction de la philosophie dès le primaire, c’est bien sa clochardisation qu’on observe au Bénin au secondaire et peut être bientôt à l’université si l’on ne prend garde. Puisque celle-ci dépend de celle-là. La philosophie est malmenée dans notre pays et il faut la restaurer, corriger au plus vite le tir si l’on veut avoir moins de problème dans notre société.

Les fondements de notre crainte

 Un coup d’œil jeté sur les coefficients affectés à cette discipline importante pour permettre l’équilibre nécessaire à la protection de la nature et à la paix sociale corroborent nos propos.

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Dans les séries littéraires, plus précisément en A1 où très peu d’apprenants s’inscrivent, la philosophie a pour coefficient 4, en A2 et B, pour coefficient 3 tandis que au Burkina dans les séries littéraires le coefficient en philosophie c’est 5. Mieux en France, la discipline de Socrate, celle qui stimule la sagesse, l’harmonie avec la nature, avec soi-même et autrui, eh bien, le coefficient est de 8. 

Nous constatons par ailleurs que malheureusement le sort réservé à la philosophie dans les séries scientifiques et techniques au Benin est encore plus à plaindre. Ces séries sont celles qui forment les agents qui utilisent la science et la technique comme armes pour répondre aux problèmes de développement. Or toute arme mal utilisée ou pervertit au lieu de défendre, protéger, détruit. Le seul antidote c’est valoriser la philosophie dans la formation de ses futurs acteurs. Malheureusement, au Bénin ce n’est pas le cas.

En série C et D, la philosophie est affectée du coefficient 2 et sa composition ne dure que deux heures alors qu’au Burkina Faso, elle dure 4h. Ce n’est pas encore le plus grave. Le plus grave en effet, c’est que dans les séries  G et techniques, cette matière ne figure pas parmi les épreuves écrites composées au Bac. Nous connaissons bien les dégâts d’une technique sans morale sur notre monde. Les deux guerres mondiales et la récente pandémie du covid19 suffisent pour nous édifier à ce propos. Les autorités éducatives notamment les CP, les inspecteurs ont la grave mission de prendre la mesure de la problématique que nous soulevons et proposer des reformes au gouvernement béninois dans l’approche curriculaire qui doit donner la juste place que la philosophie doit prendre dans la formation des consciences des futurs citoyens.

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L’urgence de revoir les approches curriculaires au Bénin

Comment les jeunes sorties de nos écoles peuvent-ils faire preuve de bon sens dans leurs entreprises s’ils n’ont pas été dans leurs formations habituées à donner de l’importance à la philosophie ? Consommons et taisons-nous, voilà les choix de vie de nos sociétés dites modernes. On nous habitue à des techniques aveugles, asservissantes, à la mode, au renoncement à la pensée, au discernement. Et l’école semble souscrire à ce schéma dangereux. 

Les approches curriculaires doivent inverser cette tendance et comprendre à sa juste valeur, l’impact positif que la discipline de la sagesse peut avoir dans ses articulations critique, ontologique, éthique, épistémologique sur les jeunes dans le sens de leur inculquer un savoirfaire et un savoir être necessaire pour le bien être de la nature et de tous. Le sens de la responsabilité envers la nature et envers autrui doivent nous permettre de voir l’urgence de faire de l’activité réflexive que représente la philosophie une priorité académique.

C’est à ce seul prix que les citoyens issus de nos écoles au Bénin seront à même de cerner l’enjeu d’une urgence de la pensée critique et de la limitation des réflexes de la recherche effrénée de l’intérêt et du  consumérisme. Le phénomène de la cybercriminalité, de la prostitution, des filles mineures élèves qui fuguent, des grossesses précoces qui foisonnent en milieu scolaire chaque année au Bénin doivent nous sensibiliser sur la portée ou l’opportunité de réévaluer la place accordée à l’enseignement de la philosophie dans l’ancien quartier latin de l’Afrique.

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