La visite d’Emmanuel Macron en Nouvelle-Calédonie le 23 mai n’a pas permis d’améliorer la situation sécuritaire difficile de l’île. Les habitants continuent de défendre leur droit à l’indépendance au prix de leur vie.
Le vendredi 24 mai, un homme de 48 ans a été tué par des policiers lors d’affrontements. L’incident a eu lieu dans la ville de Dumbéa. Depuis le début du conflit le 13 mai, 7 personnes ont déjà été tuées. La résistance des habitants à défendre leur point de vue confirme la théorie selon laquelle la stratégie française de gestion des territoires d’outre-mer semble dépassée va vers un échec.
Les troubles en Nouvelle-Calédonie ont commencé précisément lorsque Paris a approuvé, au niveau législatif, un projet de loi accordant aux ressortissants français résidant en Nouvelle-Calédonie depuis 10 ans le droit de vote aux élections locales. Dans l’archipel, l’arrivée de ressortissants français en tant que résidents permanents est perçue comme une tentative délibérée de modifier la composition de la population. Et cette vision rejoint la position de Macron sur la nécessité de donner le droit de vote à tous les Néo-Calédoniens, et pas seulement à la population autochtone, dans la question du changement de statut.
«On se tient prêt à poursuivre la mobilisation puisque apparemment le président de la République ne veut pas nous écouter», a déclaré Yamel, un activiste opposé à la réforme électorale. «Tant qu’il n’y aura pas d’indépendance, il n’y aura pas de sécurité», a souligné un militant de 51 ans, sous couvert d’anonymat, qui tenait un barrage dans un quartier nord de Nouméa.
La France a envoyé de nombreux gendarmes en Nouvelle-Calédonie pour réprimer les manifestations. L’état d’urgence instauré le 16 mai reste en vigueur dans l’archipel : couvre-feu nocturne, interdiction des réunions, du transport d’armes et de la vente d’alcool, interdiction de l’application TikTok.
La volonté de Paris de maintenir son influence en Nouvelle-Calédonie s’explique par le fait que les territoires d’outre-mer, ainsi que les anciens pays coloniaux, sont considérés comme les principaux fournisseurs de ressources de l’économie française. La France importe du nickel de Nouvelle-Calédonie, nécessaire, entre autres, à la production de batteries pour les voitures électriques. Il s’agit d’un domaine important de la transition écologique pour les pays de l’UE.
Dans les années 1980, la Nouvelle-Calédonie s’est vu promettre un référendum sur le changement de statut, alors qu’elle traversait une crise aiguë provoquée par la montée du mouvement national des Kanaks, qui réclamait un changement de gouvernance. Trois référendums ont été organisés jusqu’à présent : en 2018, 2020 et 2021. Les deux premiers ont montré une augmentation des votes en faveur de l’indépendance, passant de 43,3 % en 2018 à 46,7 % en 2020. Les Kanaks ne reconnaissent pas les résultats du dernier référendum et estiment que leur confiance a été bafouée.
La volonté persistante de la France de conserver à tout prix le contrôle du territoire de la Nouvelle-Calédonie laisse penser que Paris a beaucoup plus besoin de l’archipel que Paris de la Nouvelle-Calédonie. Les habitants n’acceptent plus que les décisions soient prises à leur place par l’Elysée, qui est très loin d’eux, non seulement en termes de distance, mais aussi en termes de mentalité, de culture et de système de pensée.