Mali, Tchad, Guinée… le fait accompli du gouvernement militaire est-t-il contagieux ?
« C’est toujours la même chose: avant la Guinée dimanche, il y a eu le Tchad, le Mali deux fois de suite… »: Ahmed Sankaré peste contre ces prises de pouvoir anticonstitutionnelles qui se sont succédé depuis un an en Afrique subsaharienne, « sans que cela n’ait de conséquence pour les putschistes ».
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Le putsch guinéen, quatrième coup de force en un an (dont deux au Mali), reste en travers de la gorge de ce vendeur de téléphones dans la capitale malienne Bamako: « A quoi ça sert d’avoir des Constitutions, la Cédéao(organisation sous-régionale d’Afrique de l’Ouest) et la diplomatie mondiale, si à la fin tout est permis ? »
Dimanche soir, la Cédéao et une large partie de la communauté internationale ont condamné le putsch de dimanche à Conakry comme ils l’avaient fait après le 18 août 2020 et à nouveau le 24 mai au Mali. Le langage de l’époque, condamnation, appel à un retour à l’ordre constitutionnel, libération des personnes détenues, ne différait guère de celui d’aujourd’hui.
Un an après, les militaires maliens sont toujours aux commandes et, s’ils ont promis de rendre le pouvoir aux civils après des élections en février 2022, le retard pris par le processus fait douter de leur volonté réelle.
Au Tchad, au lendemain de la mort du maréchal Idriss Déby Itno le 20 avril, une junte emmenée par son fils a annoncé prendre le pouvoir, alors que le président de l’Assemblée aurait dû assurer un intérim avant des élections. La France, principal partenaire du Tchad, a rapidement avalisé cette transition militaire et soutient depuis qu’il ne s’agit pas d’un coup d’Etat.
Au Mali comme au Tchad, les présidents sont aujourd’hui des militaires issus des forces spéciales –le colonel Assimi Goïta à Bamako, le général Mahamat Idriss Déby à N’Djamena– et les Constitutions sont mises entre parenthèses au profit de « chartes de transition ».
« Climat favorable »
« La communauté internationale a perdu son effet de levier, d’une part en avalisant le coup d’Etat au Mali, ensuite au Tchad en embrassant littéralement, en la personne de (Emmanuel) Macron, le fils du président défunt qui a pris le pouvoir », dit à l’AFP Peter J. Pham, ancien envoyé spécial des Etats-Unis sur le Sahel.