En RDC, le rappeur Katembo Delphin alias Idengo a été condamné, vendredi 17 décembre, à dix ans de prison ferme. Le jeune musicien et un autre collègue artiste ont été reconnu coupable d’avoir critiqué le chef de l’Etat et l’armée, à qui ils reprochent dans leurs chansons de ne pas mettre fin aux violences dans l’est de la RDC.
Vendredi 17 décembre 2021, le tribunal militaire de garnison de Goma a condamné le musicien Delphin Katembo, alias Idengo (32 ans), à dix ans de prison ferme. Muyisa Nzanzu Makasi (33 ans), a quant à lui été condamné à 2 ans par le même tribunal militaire.
Le premier a été reconnu coupable d’outrage à l’armée, participation à une entreprise de démobilisation de l’armée et incitation à s’armer contre l’autorité de l’Etat, tandis que le second a quant à lui été condamné pour outrage au chef de l’Etat. Selon le tribunal, Delphin Katembo a commis ces infractions à travers les chansons “Ce n’est pas normal” et “Effacer le tableau”, pour lesquelles le rappeur s’apprêtait à tenir un concert à Butembo lorsqu’il fut appréhendé par les éléments de l’Agence nationale des renseignements (ANR).
A l’audience fin novembre devant le tribunal, siégeant dans l’enceinte de la prison centrale de Goma, Idengo avait dit « maintenir ce qui est dit dans (ses) chansons ». « Chez nous à Beni, on tue les gens chaque jour depuis 2014 », avait expliqué le chanteur, auteur notamment d’une chanson titrée « C’est pas normal ». Muyisa avait quant à lui rappelé que lorsqu’il était en campagne électorale, le président Félix Tshisekedi avait « promis de mettre fin aux massacres » mais, avait-il dit, « rien n’a changé ».
L’état de siège face à l’aggravation des violences
Des dizaines de groupes armés de taille variable sévissent encore dans l’Est de la RDC. Ils seraient même 122 d’après un groupe d’experts. Les ADF, à l’origine des rebelles musulmans ougandais, sont de loin les plus meurtriers. Ils sont accusés du massacre de plus de 1.000 civils rien que depuis novembre 2019 dans le territoire de Beni.
En mai dernier, le président congolais, Felix Tshisekedi, a déclaré vendredi l’état de siège face à l’aggravation des violences dans les provinces orientales de l’Ituri et du Nord-Kivu, qui ont fait des centaines de morts cette année et déplacé plus de 1,5 million de personnes. Riches en minerais, frontalière de l’Ouganda, du Rwanda et du Burundi, les deux provinces du Nord et du Sud-Kivu ont basculé dans la violence lors des deux guerres du Congo (1996-1997 et 1998-2003), sans parvenir à retrouver une vraie stabilité depuis. Après une quinzaine d’années d’accalmie, la province de l’Ituri, plus au nord, est en proie aux violences depuis fin 2017.