Report d’élection au Sénégal: l’opposition vent debout, la Cedeao confuse et la France prudente
Le président sénégalais Macky Sall a décrété le report sine die de l’élection présidentielle prévue pour le 25 février 2024. Cette décision, annoncée dans un discours à la nation le 3 février, intervient juste avant le début de la campagne électorale. Une situation lourde de conséquence qui enfonce le pays davantage dans une lourde crise politique.
Macky Sall, ancien président sénégalais
Le report de l’élection est une situation sans précédent au Sénégal depuis 1963. Cette annonce fait suite à la mise en place d’une commission parlementaire enquêtant sur deux juges du Conseil constitutionnel, dont l’intégrité dans le processus électoral est contestée. Le Conseil constitutionnel avait précédemment approuvé 20 candidats à l’élection, mais d’âpres débats ont éclaté au sujet de certains d’entre eux, notamment de celui qui possède la double nationalité. Une commission parlementaire a donc été mise en place pour enquêter sur deux membres du conseil soupçonnés de corruption.
Le président Sall a exprimé son désir de ne pas interférer dans le travail de cette commission et de respecter le principe de séparation des pouvoirs alors qu’il avait annoncé qu’il ne se présenterait pas à l’élection en raison des limitations constitutionnelles des délais du mandat. Le parti au pouvoir avait désigné en qualité de candidat le premier ministre, Amadou Ba.
Dans la foulée, le secrétaire général du gouvernement sénégalais au rang de ministre, Abdou Latif Coulibaly, annonce sa démission du gouvernement, soulignant que cette décision est intervenue quelques heures après le discours télévisé du chef de l’État Macky Sall qui a annoncé le report de la présidentielle initialement prévue pour le 25 février. Ayant pris « note de l’adresse au peuple sénégalais, j’ai décidé de partir. Après mûre réflexion, j’ai pris la décision de tirer toutes les conséquences de tout cela, pour quitter le gouvernement », a déclaré Abdou Latif Coulibaly, frère d’un des juges du conseil constitutionnel soupçonné de corruption.
Des réactions diverses ont émergé, avec des appels à l’unité contre le report de l’élection et des critiques sur l’absence de base légale pour cette décision. Des candidats de l’opposition et des membres de la société civile envisagent de contester le décret et de poursuivre leurs campagnes électorales.
Situation justifiée
Selon la Task Force républicaine, qui regroupe l’Alliance pour la République (APR) et d’autres partisans du président sénégalais Macky Sall, le report de l’élection présidentielle est bien justifiée. « La Task Force républicaine salue et soutient totalement la décision du président de la République tout en invitant les Sénégalais à faire preuve de responsabilité dans le traitement de cette question », indique le communiqué de l’association cité par l’agence de presse sénégalaise APS.
« À situation exceptionnelle, décision exceptionnelle » estime Mamadou Guissé, cadre de l’APR (coalition BBY), le parti présidentiel, dans la commune d’Hann-Bel Air à Dakar. « La meilleure décision est de marquer un pas et discuter pour rendre le processus meilleur et inclusif de façon à ce que l’élection soit libre et légitime aux yeux des populations », juge-t-il.