Les propos du Président de la France, Emmanuel Macron, sur l’existence d’une « nation algérienne » avant la colonisation française ont suscité un tollé général dans le pays d’Abdelmadjid Tebboune. Selon le journal Jeune Afrique, citant l’historien Tramor Quemeneur, le sujet est tellement sensible qu’il mérite réflexion.
À la suite d’un discours dans lequel il « demande pardon » aux harkis et fait l’annonce d’une loi de « reconnaissance et de réparation », le Président français a accordé une audience, le 30 septembre 2021, à dix-huit jeunes issus de familles qui ont vécu dans leur chair, la guerre d’Algérie (harkis, appelés pieds noirs, et même militants du FLN).
La goutte d’eau qui a fait déborder le vase
Au cours des discussions, notamment, avec l’un de ses invités, Emmanuel Macron s’est posé la question de savoir, dans des propos rapportés par Jeune Afrique, citant Le Monde, si on pouvait parler de l’existence d’une « nation algérienne avant la colonisation française », propos qui ne sont pas pour plaire aux autorités algériennes, qui ont manifesté leur mécontentement, en rappelant leur ambassadeur, près la France, et en fermant leur espace aérien aux avions de l’opération « Barkhane ».
Faut-il le rappeler, la crise couvait déjà depuis que l’Elysée a pris une mesure visant à réduire de moitié le nombre de visas accordé aux ressortissants du Maghreb.
La réflexion de Tramor Quemeneur
À en croire l’historien Tramor Quemeneur, rapporté par Jeune Afrique, « lors de la période ottomane de l’Algérie, on pouvait déjà observer une sorte d’autonomie, ou plutôt plusieurs territoires autonomes, le pays étant fragmenté », ajoutant que « la conquête de l’Algérie par les frères Barberousse avait donné lieu à une organisation politique très différente de celle mise en place par la colonisation française ».
L’historien poursuit sa réflexion par une analogie sur l’Algérie de l’époque et celle de nos jours. « La conquête de l’Algérie par les frères Barberousse avait donné lieu à une organisation politique très différente de celle mise en place par la colonisation française. », informe-t-il. « C’est d’ailleurs la population vivant sur le territoire constituant l’Algérie actuelle qui avait appelé à la rescousse les frères Barberousse, au moment où les forces espagnoles commençaient à prendre possession des zones côtières. », ajoute-t-il.
C’est, dit-il, à partir de-là que l’Algérie a commencé par entretenir des relations avec d’autres pays. « Cette autonomie, relativement importante, a permis à la Régence d’Alger d’avoir une diplomatie et d’entretenir des liens directs avec d’autres puissances, dont la France, qui avait donc des relations bilatérales avec Alger. », ajoute-t-il.
L’historien conclut sa réflexion, en ces termes : « Aujourd’hui, il est nécessaire de faire bouger les choses et de sortir de ce blocage mortifère, dont pâtissent en premier lieu les peuples. Il y a des relations fortes entre les deux pays. Des familles sont touchées par ces tensions diplomatiques, essentiellement des familles algériennes ou d’origine algérienne. »
Pour information, Tramor Quemeneur, est historien de la guerre d’Algérie et membre du conseil d’orientation du Musée national de l’histoire de l’immigration (MNHI), à Paris, en France.