Au Togo, la folle « folie » de Aamron traitée en trois semaines
Le 27 mai 2025, le rappeur Aamron se faisait arrêté dans des conditions troubles. Interné en hôpital psychiatrique sous prétexte de « défaillance mentale », il refait surface un mois plus tard, bouleversé mais déterminé. Retour sur une affaire qui dépasse la seule personne du rappeur militant, et interroge les libertés au Togo.
Aamron
Dans la nuit du 26 au 27 mai 2025, le rappeur engagé Aamron — de son vrai nom Tchala Essowè Narcisse — est interpellé à son domicile, en présence de sa famille. Quelques heures plus tard, il est interné dans un centre psychiatrique sous le motif de « défaillance mentale ». Un diagnostic contesté, dont il dit aujourd’hui avoir compris qu’il constituait une « porte de non-retour », le condamnant symboliquement à la mort civile.
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Pendant plusieurs jours, Aamron reste invisible. Sur les réseaux sociaux, la rumeur enfle. Militants, artistes, organisations de défense des droits de l’homme s’inquiètent. L’affaire devient emblématique d’un système de répression indirecte qui est de faire passer les voix dissidentes pour folles, pour les museler. La jeunesse togolaise, notamment, se mobilise. Pétitions, vidéos de soutien, appels à la libération… se multiplient jusqu’à ce qu’une première victoire apparaisse.
Le 21 juin, Aamron est libéré, mais attend le 27 juin pour s’exprimer. Et ses mots sont forts. Dans un long message publié sur les réseaux, il raconte sa descente aux enfers, son acceptation du sacrifice, sa volonté de mourir pour réveiller un peuple qu’il jugeait « en coma ». Il confesse avoir sciemment accepté de devenir un « agneau sacrificiel », espérant qu’un électrochoc pourrait relancer la conscience nationale.
« J’avais décidé d’offrir ma vie en sacrifice, tout en espérant que ma chute ou ma disparition puisse permettre à tout un peuple de retrouver sa dignité et son courage », écrit-il.
Dans un message rédigé à la première personne, Aamron se présente comme un homme traversé par la souffrance, la foi et la certitude d’avoir accompli une mission. Interné pour « défaillance mentale », il revient sur cette expérience avec des mots chargés de sens et de douleur.« Je savais que j’avais franchi la porte du NON RETOUR… Elle ne dépendrait plus de moi. », ecrit-il. Il ne se dit pas victime, mais martyr volontaire. Il affirme avoir accepté l’idée de mourir pour provoquer un « choc émotionnel » dans la conscience nationale.