Au Bénin, un PPEA II bis au nez et à la barbe de Patrice Talon?

affaire ppea 2
Lors d’une descente à Parakou le 21 juin 2025, le ministre Paulin Akponna a dénoncé la mauvaise gestion des fonds publics destinés à l’eau et à l’électricité sous l’ère de l’ancien ministre Séidou Adambi. Il s’est dit attristé de voir des quartiers sans eau ni électricité malgré les « dizaines de milliards » investis depuis 2016. Il a pointé du doigt un « siphonnage du budget national » par certains acteurs locaux, accusés d’avoir détourné plusieurs milliards de francs CFA prévus pour ces projets essentiels. Ces responsables, ayant bénéficié de la confiance de l’État, auraient failli à leurs engagements en privilégiant leurs ambitions personnelles plutôt que l’intérêt collectif. Akponna qualifie même la situation de « criminelle » et promet que ces « siphonneurs », en divagation dans la nature devront « répondre de leur gestion » devant la justice.
Ce discours fait écho au scandale PPEA II survenu lors du mandat de l’ancien président Boni Yayi. Le Programme Pluriannuel d’Appui au secteur de l’Eau et de l’Assainissement (PPEA II) (2013-2015) était financé en grande partie par les Pays-Bas, pour un montant total d’environ 43,65 milliards FCFA. En avril 2015, un audit annuel révéla un détournement d’environ 3 milliards FCFA dans ce programme. Le 6 mai 2015, face à l’inaction initiale du gouvernement béninois, la ministre néerlandaise de la Coopération Lilianne Ploumen suspend la coopération bilatérale : l’aide néerlandaise fut gelée jusqu’à ce que toute la lumière soit faite sur l’affaire. Sous la pression, le ministre béninois de l’Énergie et de l’Eau de l’époque, Barthélemy Kassa, présumé impliqué, dut démissionner le 12 mai 2015 (tout en niant son implication).
Un audit international mené par le cabinet Kroll en juillet 2015 confirma l’ampleur de la fraude : 2,6 milliards FCFA de fonds néerlandais avaient été détournés dans le PPEA II, et environ 5 milliards supplémentaires avaient « disparu » via d’autres ministères. Le rapport Kroll a mis au jour un réseau de fraude impliquant des cadres de la Direction générale de l’Eau, des opérateurs privés, et a mentionné que Barthélémy Kassa, alors ministre de l’eau, était au courant des malversations sans réagir. En réaction, le gouvernement Yayi prit des mesures fortes sur le papier : Conseil des ministres extraordinaire le 27 juillet 2015 ordonnant des poursuites judiciaires contre toutes les personnes citées, la radiation des fonctionnaires impliqués, l’exclusion des entreprises complices des marchés publics et la saisine du Parlement pour traduire l’ex-ministre Kassa devant la Haute Cour de Justice. Des mandats d’arrêt internationaux furent même annoncés contre les auteurs en fuite. Ces actions énergiques convainquirent la partie néerlandaise de reprendre sa coopération. En septembre 2015, les Pays-Bas ont salué les mesures prises tout en les liant à la reprise progressive de 95 milliards FCFA d’aide prévue sur 2014-2017.