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Gouvernance foncière au Bénin: le Titre Foncier face aux opérations de lotissement/remembrement

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Le lotissement/remembrement au Bénin, en raison de son caractère atypique, suscite beaucoup de débats au sein des populations, des divers administrations, cabinets et bureaux d’études intéressés, autour de certaines questions aussi pertinentes et délicates les unes que les autres.

Parmi ces questions, figure par exemple, celle relative au sort réservé, dans le cadre des travaux, aux parcelles de terrain qui sont nanties de Titre Foncier (TF).

En guise de contribution au débat sur cette problématique du TF, voici quelques éléments de réflexion ci-dessous.

Du droit de propriété

La propriété fait partie des « droits naturels et imprescriptibles » consacrés par la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (DUDH).

Généralement défini comme étant la faculté qui est reconnue à une personne (physique ou morale) d’user, de jouir et de disposer librement d’un bien (meuble ou immeuble) de façon totale et en toute quiétude, le droit de propriété reste sacré et inviolable.

Cependant, en dépit de toute cette garantie juridique qui lui est attachée, des mécanismes légaux existent qui permettent aux Pouvoirs Publics, lorsque les circonstances l’exigent, de porter atteinte au droit de propriété.

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De la déclaration d’utilité publique

Dans le cadre de l’exercice de leurs compétences et prérogatives, les Pouvoirs Publics sont amenés souvent, au nom de l’intérêt général (pour le bien collectif) dont ils sont les garants, à devoir déroger au principe d’inviolabilité en portant atteinte aux droits de propriété.

Mais l’usage de cette dérogation spéciale n’est réputé régulier que lorsque la Déclaration d’Utilité Publique (DUP) de l’action projetée est préalablement actée conformément à la procédure requise en la matière.

Fondée sur le principe universel selon lequel « l’intérêt général prime sur l’intérêt particulier », la DUP constitue ainsi, l’instrument juridique qui permet aux Pouvoirs Publics de porter atteinte dans la légalité (expropriation – limitation du droit de propriété – empiètement….) aux propriétés mobilières et immobilières, dans le cadre de la mise en œuvre de leurs divers projets de développement.

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Du Titre Foncier (TF)

Le TF est régi au Bénin par le Code Foncier et Domanial.

Il peut être défini comme étant l’acte juridico-administratif par lequel l’autorité publique compétente reconnaît et atteste du droit de propriété d’une personne (physique ou morale) sur un bien immobilier. C’est le seul et unique titre qui confère à son titulaire la pleine propriété et lui procure la sécurité foncière.

Du Lotissement/Remembrement

Au Bénin, c’est l’opération d’urbanisme la plus connue et la plus pratiquée. Il consiste en un ensemble d’études et de travaux réalisés relativement à un espace territorial donné, généralement situé en zone périurbaine, et destinés à réorganiser et à transformer l’occupation de cet espace, en vue d’y améliorer la qualité et le cadre de vie des habitants, à travers la mise en place progressive des infrastructures nécessaires.

Véritable outil d’intégration urbaine, le lotissement/remembrement a donc pour objet ou pour effet, dans un périmètre donné, de modifier les limites et contenances des propriétés foncières concernées, ainsi que les servitudes et les charges qui leur sont attachées, en vue de la réalisation de travaux d’aménagement et d’équipement d’intérêt collectif (ouverture et construction de voies, installation de réseaux de drainage, d’assainissement, d’eau potable, d’électricité, de télécommunication, etc….).

La caractéristique fondamentale de cette opération et qui la différencie du lotissement (dans l’acception classique du terme) est qu’elle se rapporte à un périmètre qui regroupe plusieurs propriétés foncières (bâties et non bâties) alors que dans l’autre cas le périmètre est nu et d’un seul tenant (appartenant à un propriétaire unique).

Conformément à la réglementation nationale en vigueur qui a, au demeurant, pris en compte sa spécificité, l’opération de lotissement/remembrement se déroule en plusieurs phases successives durant lesquelles diverses actions et tâches sont mises en œuvre par les acteurs impliqués. Au nombre de ces actions figurent deux qui paraissent cruciales et sur lesquelles il serait utile de s’attarder. Il s’agit de (i) l’immatriculation préalable du périmètre concerné, et de (ii) la détermination du coefficient de réduction.

Immatriculation : nécessité d’une déclaration d’utilité publique

Les textes disposent, entre autres, que tout initiateur de projet de lotissement/remembrement est tenu d’accomplir les formalités requises en vue de l’obtention du TF du périmètre à traiter, lequel titre constitue une des pièces maîtresses du dossier de demande d’autorisation administrative.

Ledit périmètre étant constitué d’une multitude d’unités foncières (nanties les unes d’actes présomptifs de propriété et les autres de TF), la déclaration d’utilité publique telle que prévue par la réglementation, est donc nécessaire afin de permettre à l’opérateur de porter atteinte, dans la suite du processus, aux divers droits de propriété en présence.

Détermination et application du coefficient de réduction

Le calcul du coefficient de réduction est une tâche dont l’exécution intervient au cours de la phase d’étude d’urbanisme, laquelle fait suite aux travaux d’état des lieux à l’issue desquels sont produits (i) un plan de base assorti d’un répertoire des différents propriétaires et présumés propriétaires avec l’apport foncier de chacun d’eux.

Sur la base, notamment, du plan d’état des lieux, l’urbaniste étudie et conçoit le plan de voirie et d’équipements qui peut être assimilé à un document de « spécialisation spatiale ». C’est ce plan, en effet, qui crée, à l’intérieur du périmètre à aménager, (i) un espace collectif constitué par les emprises des voies de circulation ainsi que les domaines prévus pour accueillir (progressivement) les équipements socio-collectifs nécessaires à la satisfaction des besoins des populations concernées, et (ii) un espace privatif composé des différents îlots destinés à l’habitation.

Chacun de ces deux espaces représente un certain pourcentage par rapport à la superficie totale du périmètre d’opération.

C’est le pourcentage qui concerne l’espace collectif qui est dénommé coefficient de réduction, une expression argotique du Bénin. Il varie d’une opération à l’autre mais ne devrait pas excéder le seuil légal fixé à 25.

C’est ce coefficient qui, une fois validé par les instances habilitées, est appliqué, toujours durant la phase d’étude d’urbanisme, à chaque unité foncière pour obtenir la contenance de la parcelle de terrain a attribué, au cours de la phase dite de recasement, à son propriétaire ou présumé propriétaire.

La pratique du coefficient de réduction dans les opérations de lotissement/remembrement apparaît ainsi comme une formule originale, propre au contexte du Bénin.

Elle permet de faire participer tous les bénéficiaires d’une opération donnée, propriétaires comme présumés propriétaires, à l’effort de viabilisation (constitution de l’espace collectif), à travers une contribution foncière.

Des idées reçues sur le TF et le Lotissement/Remembrement

Au sein de la population, beaucoup de choses se disent et se répandent, des spéculations se font concernant la conduite à tenir, dans le cadre d’une opération, par rapport aux immeubles dotés de TF.

En effet, innombrables sont celles et ceux qui pensent et soutiennent des assertions telles que (i) une propriété nantie de TF ne doit pas être affectée par l’application du coefficient de réduction, (ii) le propriétaire (légal) d’un domaine a la latitude de faire morceler celui-ci à des fins de commercialisation, (iii) une opération peut être interdite ou suspendue par un juge pour cause de litige, etc…..

Mais alors, à la lumière de tout ce qui précède, quel crédit pourrait-on accorder à ces idées reçues qui, au reste, sont bien ancrées ?

Contribution foncière obligatoire

Dès lors qu’une opération est régulièrement déclarée d’utilité publique, l’initiateur est habilité, dans le cadre de sa réalisation, à porter atteinte aux droits de propriété détenus sur l’ensemble des unités foncières contenues dans le périmètre à aménager, en vue de constituer l’espace collectif indispensable à la viabilisation dudit périmètre, pour le bien et le bonheur de tous ses habitants, propriétaires comme présumés propriétaires.

Toutefois, pour des raisons évidentes d’équité, il serait souhaitable d’envisager une mesure spéciale en faveur des propriétaires détenteurs de TF, à l’occasion des formalités pour l’obtention de titres ultimes de propriété. À cet effet, l’exemption par exemple, au profit des intéressés, du paiement des frais requis, constitue une piste qui pourrait être utilement explorée.

Morcellement pirate

La détention par une personne du TF d’un domaine donné n’habilite nullement celle-ci à le morceler et en commercialiser les lots. C’est une condition nécessaire certes, mais elle n’est pas suffisante.

En effet, « la division volontaire d’une propriété foncière par ventes ou par locations simultanées ou successives, consenties en vue de l’habitation, d’usages commerciaux ou industriels » constitue une opération de lotissement aux termes de la réglementation nationale.

Elle est subordonnée à l’obtention préalable d’une autorisation administrative.

En conséquence, tout morcellement de domaine n’ayant pas obtenu une autorisation administrative préalable, peut être qualifié d’irrégulier et donc traité comme tel.

C’est d’ailleurs pourquoi, aucun professionnel ne devrait, normalement, prendre en compte ces opérations pirates, lors des travaux d’état des lieux. Mais hélas ! ! ! ! ! !.

C’est pourquoi aussi, les organes de presse devraient s’abstenir de diffuser ou de relayer les publicités (mensongères) relatives auxdites opérations.

Improbable décision judiciaire

Le lotissement/remembrement, tel que régi par les textes en vigueur, n’a pas vocation à créer ou à établir de droits fonciers, mais plutôt à organiser l’occupation de l’espace à l’intérieur d’un périmètre donné, en vue d’y créer les conditions favorables à une vie agréable pour ses habitants.

De ce point de vue, une décision de justice pour suspendre ou interdire une opération pour raison de litige foncier (contestation de propriété) serait invraisemblable.

Christian SOSSOU, Urbaniste

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